La Banque centrale européenne tiendra compte des enjeux climatiques dans la gestion de son portefeuille obligataire et des titres qu’elle accepte en garantie. L’objectif est d’encourager les entreprises à redoubler d’efforts en matière d’engagement écologique.
Favoriser les entreprises vertes, le projet a débuté il y a 3 ans
Depuis l’entrée en fonction de Christine Lagarde il y a près de trois ans, l’agence monétaire n’a cessé de s’engager à soutenir la lutte contre le changement climatique. Mais en fait, elle s’est heurtée à un dogme : respectant le principe de « neutralité du marché », ses investissements obligataires doivent refléter la structure de l’économie. Quitte à détenir des titres pollueurs comme Shell ou Total, gros émetteurs de carbone et de dettes, contredisant cette ambition verte.
« Avec ces décisions, nous traduisons en action notre engagement en faveur de la lutte contre le changement climatique », a déclaré la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, dans un communiqué.
La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé lundi 4 juillet avoir entamé un virage environnemental majeur en introduisant des normes vertes dans certaines de ses opérations.
Bien que la mise en œuvre complète de ces mesures prendra des années, elles devraient avoir des répercussions sur l’ensemble du système financier. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a lancé le projet peu après son entrée en fonction fin 2019.
A l’époque, le sujet restait largement tabou dans le monde très conservateur des banquiers centraux. Certains d’entre eux craignent que la banque centrale ne manque à son rôle officiel d’assurer la stabilité des prix.
Il s’agit du plan le plus ambitieux jamais entrepris par une banque centrale sur la question climatique. La Banque centrale européenne a présenté lundi matin ses intentions de mesures de politique monétaire verte pour faciliter la réponse au réchauffement climatique et à la transition énergétique, et réduire les risques financiers liés au réchauffement climatique.
Encourager les entreprises à prendre le virage écologique
L’institution donne la priorité aux entreprises ayant le comportement le plus respectueux de l’environnement. Cette bonne performance climatique se caractérisera par de faibles émissions de gaz à effet de serre, des objectifs ambitieux de réduction de carbone et un reporting climat satisfaisant.
L’action de la BCE se déroulera en trois phases. À partir d’octobre, elle révisera les critères d’achat d’obligations d’entreprises. Car les institutions monétaires sont très actives sur les marchés financiers : depuis 2015, elles achètent des titres pour soutenir l’économie.
Au total, la BCE a acquis près de 5 000 milliards d’euros, dont la grande majorité sont des obligations d’État. Une petite partie (344 milliards d’euros) est constituée de dettes d’entreprises. Le problème est que la composition de ces achats reflète le panorama des entreprises qui existent sur le marché, dont une grande partie est très polluante.
Désormais, la BCE a annoncé qu’elle allait “réorienter” son portefeuille obligataire vers des entreprises “climatiquement meilleures”. Elle les jugera sur trois critères : les niveaux d’émissions de dioxyde de carbone, les objectifs de réduction des émissions et la transparence avec laquelle les entreprises divulguent leur empreinte carbone.
Le montant en jeu devrait avoisiner les 30 milliards d’euros par an, soit 10% de l’encours de la dette des entreprises détenue par l’institution de Francfort.
« Si vous comparez cela à d’autres banques centrales, c’est un montant substantiel, donc cela fait une différence », a affirmé Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE , dans une réunion avec des journalistes.
C’est une révolution pour la BCE, qui avait jusqu’à présent pour dogme la neutralité du marché. En d’autres termes, la banque centrale devait acheter des titres d’entreprises éligibles dans des proportions égales pour éviter les distorsions entre les emprunteurs.
Mais ce faisant, comme le concède Isabel Schnabel, les entreprises les plus polluantes (souvent les plus gros émetteurs d’obligations) sont favorisées.
En revanche, elle a explicitement écarté l’idée d’exclure complètement les emprunteurs les plus “sales”, notamment les compagnies pétrolières, des achats de la BCE, arguant qu’il serait plus utile d’encourager les entreprises à réduire leurs émissions.