Surnommé “la plus grande arnaque de l’histoire” par le fonds spéculatif Hindenburg Research, les événements affectant l’empire de Gautam Adani ont créé des turbulences jusque dans la sphère politique indienne.
Sa fortune personnelle divisée par 2
Il y a quelques jours, il était le troisième homme le plus riche du monde. Gautam Adani, le magnat de 60 ans à la tête d’un des plus grands conglomérats indiens, qui a construit son empire en s’enrichissant en négociant des matières premières, s’était rapproché du pouvoir indien.
Les accusations de fraude comptable par le notoire vendeur à découvert Hindenburg Research ont envoyé les entreprises de la galaxie Adani sur le marché boursier par le fond. Cette chute vertigineuse a fait fondre la fortune personnelle de 50 milliards de dollars du magnat en une seule semaine. Ce qui l’a rétrogradé au rang de n°15 sur la liste des personnes les plus riches de Forbes.
Le scandale a discrédité le capitalisme indien et est considéré comme une attaque contre le pays, se répercutant même dans la sphère politique.
L’enquête a été menée par des analystes financiers très écoutés sur les marchés. Hindenburg Research a été fondé par Nathan Anderson, et ce n’est pas son premier fait d’arme. C’est lui qui a dénoncé la fraude du constructeur de camions à hydrogène Nikola, dont le patron a eu l’audace de mentir à ses investisseurs.
Cette fois, c’est le duo indien Adani qui a été visé par Nathan Anderson et son équipe. Ils ont fourni la preuve que les données publiques sur sa solvabilité ont été manipulées par les dirigeants à la suite d’une enquête de deux ans sur le groupe. Une pratique grave parmi de nombreuses autres.
Le marché boursier impitoyable a immédiatement réagi. En quelques jours, Adani Group a perdu 120 milliards de dollars de capitalisation totale, soit plus de la moitié de ce que valaient ses actions à la mi-janvier. Face à d’énormes flux de capitaux, certaines filiales ont dû suspendre leurs activités vendredi.
La fortune de Gautam Adani, l’ancien troisième homme le plus riche du monde à l’automne, s’est effondrée : elle est aujourd’hui estimée à 69 milliards de dollars, alors qu’elle valait le double il y a dix jours.
Des menaces de représailles
L’empire Adani, qui s’étend des mines de charbon en Australie au plus grand port de l’Inde, avait une capitalisation combinée de plus de 218 milliards de dollars à travers ses sept sociétés cotées.
Le rapport accuse Gautam de “manipulation effrontée des actions” et de “fraude comptable de plusieurs décennies”. Il a également pointé du doigt le “labyrinthe d’entités offshore imaginaires” géré par le frère de Gautam Adani, Vinod, dans des paradis fiscaux tels que Maurice, Chypre et plusieurs îles des Caraïbes, ainsi que “l’indulgence du gouvernement” et de nombreux observateurs qui, par crainte de représailles, sont restés silencieux.
Le régulateur indien des valeurs mobilières, le Securities and Exchange Board of India (SEBI), a déclaré dans un communiqué que les marchés financiers indiens « font preuve d’une stabilité continue et continuent de fonctionner de manière transparente, équitable et efficace ».
Il a ajouté qu’il avait “mis en place un ensemble clair de mesures de surveillance, ouvertes au public”, pour faire face à la volatilité excessive de certains titres, sans mentionner Adani Group.
Le groupe a rejeté les allégations du rapport Hindenburg comme “rien de plus que des mensonges” et a condamné les “attaques malveillantes” contre sa réputation dans une déclaration de 413 pages.
Hindenburg a répondu que le groupe se contentait de “menaces” plutôt que d’affronter les problèmes soulevés par le rapport.
“Si Adani est sérieux, il devrait également déposer une plainte aux États-Unis”, a déclaré la société américaine dans un communiqué. Pendant le processus judiciaire, “nous aurions une longue liste de documents à demander”.
TotalEnergies impacté par cette crise
Certaines grandes banques telles que Crédit Suisse et Citigroup ont cessé d’accepter les obligations Adani comme garantie pour les prêts aux clients privés, a rapporté Bloomberg, soulevant des inquiétudes quant à la manière dont le groupe va lever de nouveaux capitaux.
Au-delà de son cas personnel, les investisseurs ont cru fermement que le géant indien et ses filiales étaient infaillibles accusent de lourdes pertes.
Parmi eux : TotalEnergies, partenaire de longue date du conglomérat indien. Le Français est actionnaire de quatre filiales dont deux entreprises publiques : Adani Total Private 50%, Adani Total Gas 37,4%, Adani Green Energy 19,75% et AGEL23 50%.
Néanmoins, TotalEnergies considère son exposition limitée” et fournit des chiffres à l’appui. “Il représente 2,4% du capital employé de l’entreprise et un résultat opérationnel net de seulement 180 millions de dollars d’ici 2022”, a déclaré la société française dans un communiqué.
